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La déprime saisonnière : un état bien humain (et surmontable)

Je dois admettre que je suis un peu déprimé. Je ne suis pas en dépression; je sais ce que c’est, pour l’avoir vécu pendant deux ans entre 2008 et 2010. Mais comment cela peut-il m’arriver à moi, le coach, le conférencier, le professeur de yoga, le yogi de Wall Street? Eh bien, le yogi de Wall Street, c’est un humain, et bien que j’aie une pratique spirituelle, ma vie d’être humain ressemble à celle de plusieurs autres. Nous venons d’ouvrir un deuxième studio de yoga, où je travaille très fort comme gestionnaire et professeur; j’ai écrit un deuxième livre; je fais beaucoup de conférences sur Le courage de réussir et j’accompagne aussi beaucoup de cadres en coaching. Je suis également papa de cinq enfants (bientôt six), un déménagement viendra sous peu, sans parler du mariage vécu cet automne. De plus, mon petit garçon de trois ans, Marcus, n’a pas compris que reculer l’heure en novembre est censé nous faire gagner du temps! Je vous le dis, ceci est un mythe pour les parents d’enfants en bas âge, car en réalité, nous perdons une heure de sommeil parce qu’eux se lèvent plus tôt…

Donc, avec le travail en continu, les aléas de la vie humaine, le manque de sommeil, le changement d’heure et la pleine lune dans la même fin de semaine, j’ai un peu le cafard. Il est vrai qu’en raison de mon cancer, je n’ai plus de thyroïde, ce qui peut expliquer un changement hormonal qui entraînerait une dépression, mais pas complètement. En fait, le pouvoir des neuroassociations du passé explique sûrement mieux ce qui se passe. Dans le livre Le moine qui vendit sa Ferrari, Robin Sharma dit que nous avons 60,000 pensées par jours et que la grande majorité d’entre elles sont les mêmes le lendemain. J’ajouterais que comme nous sommes, pour la plupart, habités par notre « mode par défaut », au moins 90 % de ces pensées sont négatives ou liées à des peurs qui n’existent pas. Ce faisant, d’un point de vue scientifique, quand nous passons du temps à ruminer des peurs dans notre tête, notre réserve de sérotonine, un neurotransmetteur et antidépresseur naturel, diminue. Lorsque nous serons ensuite aux prises avec de vrais problèmes, nous serons dépourvus de nos forces et plus facilement susceptibles de tomber en dépression ou de souffrir d’autres troubles ou dépendances.

Entre 2008 et 2010, j’ai répété souvent dans ma tête que je voulais mourir. Je décidais alors de focaliser sur ce qui n’allait pas et sur ce que je n’avais pas. Comme l’a dit Robin Sharma, j’ai peut-être ressassé ces idées des milliers de fois par jour, donc des millions fois au total. J’ai alors créé des neuroassociations, qui font en sorte que même si je médite et pratique le yoga, ma tête est habituée à suivre certains chemins et de s’agripper à ces pensées négatives et destructrices. Depuis 2010, il m’arrive environ quatre à six fois par année d’avoir des pensées négatives, voire suicidaires, lorsque je suis devant un problème ou défi de la vie humaine, mais je réussis assez rapidement à les remplacer par des croyances responsabilisantes.

Rien d’exceptionnel ne déclenche ces pensées : il suffit d’un cocktail d’événements, d’un surplus de travail, d’un manque de sommeil ou de soleil et me revoilà à broyer du noir sans pour autant avoir des pensées suicidaires. On dirait toutefois que ça me fait du bien d’être un peu déprimé. Je vais sûrement susciter des commentaires négatifs en disant cela, mais plusieurs d’entre nous se servent de leur dépression pour combler certains besoins humains. Plusieurs se sécurisent en se disant : « Si je suis comme ça, c’est parce que je suis déprimé. » Beaucoup de gens reçoivent de la reconnaissance en disant aux autres qu’ils font pitié parce qu’ils sont en dépression et vont combler ainsi leur besoin de connexion avec les autres, en se rapprochant d’eux-mêmes. En comblant de piètre façon nos besoins de sécurité, de reconnaissance et de connexion, la déprime, la dépression ou les idées noires deviennent un peu comme une doudou pour un bébé. Ils nous réconfortent et tous ceux qui veulent nous l’enlever ne nous comprennent pas. En gardant notre doudou, nous ne faisons qu’épuiser davantage nos réserves de sérotonine et nourrir la dépression.

J’ai vécu de mon côté une combinaison de tout ça. Bien que je savais ce qui se passait, je m’observais et j’observais mes pensées, mes émotions, les intentions derrière mes gestes et mes actions. Je voulais la doudou, car elle me faisait du bien (ou du moins, je pensais qu’elle me faisait du bien), jusqu’à aujourd’hui, environ une semaine après le changement d’heure. J’ai décidé que c’était terminé. Notre vie est une suite de décisions. Aujourd’hui, je décide que c’est fini et j’agis, un point, c’est tout.

Trois étapes pour focaliser sur l’essentiel

Je n’ai jamais eu la prétention d’être parfait, libre ou guéri, mais j’ai toujours dit que dans la réalité je suis à la fois le thérapeute et la thérapie. Quand je vous parle, c’est d’abord à moi que je parle; je suis le message et le messager. J’ai donc aujourd’hui décidé d’appliquer mon processus ou rituel quotidien en trois étapes que j’utilise en coaching et qui est bien décrit dans mon prochain livre, Votre mission si vous l’acceptez. Grâce à la neuroplasticité du cerveau ce processus me permet de créer de nouvelles neuroassociations.

La première composante de mon rituel, qui m’aide à garder la foi en ma mission, est de bien m’occuper de mon corps. Notre corps est le véhicule qui nous permet de bien exécuter notre mission. De plus, il envoie des messages à notre esprit, et l’inverse est aussi vrai. Je m’occupe de mon corps; il est ainsi impératif pour moi de l’activer. Comment pouvez-vous penser avoir un esprit frais, vif, curieux, dénué de jugement et qui se laisse surprendre par la vie si votre corps est endormi ou moribond?

Visualisez quelqu’un qui est déprimé : vous verrez probablement une personne qui a le dos rond, regarde par terre et joue avec ses doigts ou quelque chose comme cela. Visualisez quelqu’un qui se réalise dans sa mission, et vous verrez certainement une personne qui se tient bien droite, avec fierté, légèreté et flexibilité. Nous envoyons un message à notre cerveau selon la posture que l’on adopte. J’aime toujours rappeler la pose de la montagne (Tadasana). Elle consiste à amener une conscience dans tous les muscles du corps, qui sont activés et bien éveillés. Juste ça, tout simplement. Dans cette pose, notre corps envoie à notre esprit un message de connexion à la Terre, de fierté, de dignité, de courage et d’humilité.

La deuxième composante de mon processus est ce que je fais avec mon cœur, mon esprit et ma conscience. Je décide de me remémorer que j’ai été aimé par mon père, entre autres, mais aussi par beaucoup d’autres, seulement pour ce que je suis et qui je suis, et que je mérite d’être aimé pour moi-même. Je me le répète au moins 10 fois. Je poursuis la journée avec une pratique spirituelle. Souvent, il s’agit d’un peu de méditation ou de yoga. Après m’être libéré de mon esprit rationnel, je dois alimenter les pensées qui occupent mon esprit. Cela consiste à me répéter mes croyances responsabilisantes et à me rappeler qui je suis vraiment, et non ce qui me manque pour être parfait : je suis un bon mari, un bon papa et un bon ami; je suis gentil, empathique, intelligent et humble; je suis un bon gestionnaire, un bon coach et un bon orateur; j’ai un cœur, et pas seulement une tête; j’ai une expérience et des talents atypiques qui me permettent de réaliser de grandes choses; j’ai une personnalité charismatique; je n’ai pas peur du travail et j’utilise la peur pour grandir et accomplir ma mission. La plupart d’entre nous, habités par leur « mode par défaut », décident de concentrer leur attention sur ce qui leur manque, leurs croyances limitantes et leurs peurs. Or, si nous choisissons d’entraîner notre esprit et notre âme, lorsque nous ferons face à un défi — et Dieu sait que la vie en est remplie —, au lieu de nous affaisser à cause d’une de nos pensées limitantes, c’est une pensée du genre : « Je suis la personne la mieux outillée pour faire face à une telle situation » qui fera surface. Cela devient notre modus operandi, et c’est ce qui nous permet de réaliser notre mission avec courage. Quand je dis cela en coaching, mes clients me répondent : « Oui, oui, je le sais. » Ce n’est pas tout de le savoir, aussi faut-il le répéter des dizaines, des centaines et des milliers de fois. Et c’est ce que je me répète plusieurs fois par jour.

La troisième composante de mon processus pour conserver la foi dans ma mission consiste à choisir ce sur quoi je dirige mon attention. Si je décide de m’attarder à ce qui me manque, à mes besoins réels ou fictifs ou uniquement à ce que je veux voir pour combler mes besoins humains, ma mission sera irréalisable. Maintenant que je suis dans mon cœur, riche de mes croyances responsabilisantes et connecté à qui je suis vraiment, je décide de voir au-delà de mes besoins et je focalise mon attention sur ma contribution avec l’objectif de combler ces mêmes besoins. Je donne comme mari, père et membre d’une grande famille; comme entrepreneur, professeur de yoga, coach, conférencier, auteur et comme figure spirituelle d’affaires pour les autres sans me préoccuper dans l’immédiat des fruits de l’action. Au lieu d’être un preneur, je deviens un donneur — c’est une façon bien différente de vivre.

La qualité de notre vie dépend de la qualité de nos actions, de notre intention et de notre équilibre émotionnel. J’ai un œil sur les buts et les objectifs à moyen terme de ma mission, mais je reste concentré sur mes pensées, mes émotions, mon intention et mes actions à court terme. Je m’assure que tous mes gestes me rapprochent de ma mission, et la déprime saisonnière n’y contribue évidemment pas. Grâce à une pleine conscience de mon corps, de mon cœur et de mon intention, je l’ai surmontée et j’ai fait un pas de plus vers la personne authentique que je veux être et pour être heureux.